L'une des trois façades Renaissance du Gard
et sans doute la plus belle.
Une histoire du village qui, à partir des archives municipales, paroissiales et départementales, évoque son passionnant passé, de la protohistoire au début du XX ème siècle.
La grande est la petite histoire s'y entrelacent pour former un récit captivant qui approfondit considérablement les connaissances qu'on avait jusqu'à présent de ce lieu.
(Jean Bobot - Cavillargues en vallée de Tave - Préface de Y. du Guerny, ancien archiviste départemental - 307 pages - format 24x17)
Cavillargues est situé dans la vallée de la Tave vers l'extrémité sud-est du canton de Bagnols. De nombreux vestiges de la civilisation romaine ont été signalés sur son territoire. Une fouille récente a d'ailleurs découvert dans la commune une ancienne ferme romaine.
En 1820, M. Allègre, dans ses notes archéologiques sur l'arrondissement, signale le reste d'une voie antique, une belle tête de mercure en marbre et un aqueduc en maçonnerie, servant à conduire les eaux de la fontaine d'Auzigue. Un médaillon circulaire en terre cuite, avec représentation des jeux du cirque, fut découvert en 1845 et donné au musée de Nîmes. Une stèle funéraire en marbre portant une inscription aux dieux Mânes de Quintus Titucius Silvinus (2ème ou 3ème siècle)est encastrée dans le mur du presbytère.
Du moyen âge et de la Renaissance subsistent certaines constructions dont les deux châteaux en bon état de conservation : le château de La Fare et le château des Nicolaï (ci-dessous).
Par contre, l'église romane de Saint Pierre a été détruite en 1863 et a laissé la place à l'église actuelle.
Gabriel Arnaud, père de l'actuelle propriétaire, dont la famille vit à Cavillargues depuis le début du XVIIe, ne pouvant se résoudre à voir s'effriter cette magnifique demeure, en fit l'acquisition en 1919 et commença par faire refaire d'urgence la totalité de la toiture de l'aile Est, charpente incluse.
Au cours des années 1925-1940 des aménagements intérieurs furent effectués afin de rendre habitables certaines pièces du premier étage de cette partie du bâtiment. Sa femme et ses trois enfants y logèrent de façon permanente pendant la deuxième guerre mondiale.
Vu l'ampleur des travaux et leur coût, la reconstruction totale de l'aile sud, dont seuls les quatre murs subsistaient, s'étagea de 1948 à 1965, suivie de divers aménagements internes.
Après sa mort en 1957, sa femme, Madeleine, entretint le château et continua son oeuvre à la mesure de ses moyens.
A sa suite, Denise, leur fille, et Jean Bobot, son mari, engagèrent de nombreux et coûteux travaux tant à l'intérieur qu'à l'extérieur pour redonner au château toute sa valeur architecturale.
Ces gros travaux sont aujourd'hui achevés. La beauté retrouvée de la façade, notamment, en témoigne largement.
Divinités particulières sensées assurer la protection des tombeaux.
Les "pris faicts" passés devant le notaire Dusserre de Cavillargues et qui ont été retrouvés grâce à Monsieur Chassin du Guerny, archiviste à Nimes, nous permettent d'en savoir plus sur la construction du château.
Ce pris faict porte les signatures
Par ce nom, les catholiques de l'époque désignaient les protestants. Ils les nommaient également parpaillots ou huguenots.
L'histoire du château de La Fare de Cavillargues commence au XIIème siècle par un donjon. Au pied de cette tour vint se bâtir une maison forte adossée au rempart du village vers le XIIIème et XIVème siècle. Le château actuel a été construit au milieu du XVIème après l'incendie ayant ravagé le précédant pendant la guerre contre les "religionnaires".
Le donjon initial, probablement du XIIe siècle, domine encore le château actuel. On peut en distinguer la base dans la salle des gardes.
On ignore les instances qui présidèrent à son érection. Il est rapporté que Guillaume de Sabran, héros de la première croisade et édificateur supposé de
la chapelle du Saint SépulcreCavillargues.
Au pied de cette tour vint se bâtir une maison forte adossée au rempart du village et dont la présence est attestée par quelques voûtes caractéristiques des XIIIe et XIVe siècles.
Des aménagements successifs transformèrent ces bâtiments en demeure plus résidentielle, probablement au milieu du XVe.
De cette époque ne subsistent que :
- le réduit attenant à la salle des gardes et qui comporte une canonnière destinée à défendre la tour nord ouest des remparts
- la "patouille" à gauche de la grande cheminée de la salle des gardes.
Incendié en 1562, par les religionnaires - nom par lequel étaient désignés les partisans de la Réforme - durement combattus par les La Fare qui étaient catholiques, le château fut reconstruit de 1567 à 1571 "jusque a la mesme aulteur que cy devant estoyt".
Pour situer l'époque, notons que, en 1570 :
- le futur Henri IV a alors 18 ans et Gabrielle d'Estrées 1 an
- Montaigne 17 ans
- Shakespeare et Galilée 7 ans
- Ronsard a 47 ans
- Calvin et Michel Ange sont morts depuis 5 ans, Luther depuis 23 ans et Rabelais depuis 16 ans.
Rappelons que les massacres de la St Barthelemy ont eu lieu en 1572.
Les "pris faicts" passés devant le notaire Dusserre de Cavillargues et qui ont été retrouvés grâce à Monsieur Chassin du Guerny, archiviste à Nimes, nous
permettent d'en savoir plus sur la construction du château.
L'aile Est a été bien conservée.
Seules ont disparu les cheminées en pierre de taille décrites dans le "pris faict", sauf celle de la salle des gardes. Les deux clés de voûte de cette
salle portent toujours le blason des La Fare "d'Azur à trois flambeaux d'or allumés de gueules posés en trois pals"
Rappelons leur devise :
Lux nostris hostibus ignis
(Lumière pour nous feu pour nos ennemis).
L'aile Sud par contre, qui était identique, a dû subir un incendie au XVIIIe siècle et seuls deux vestiges de départ des voûtes d'arêtes confirment
les termes du devis. L'intérieur de cette aile a été entièrement reconstruit entre 1946 et 1954.
L'escalier d'honneur au Nord qui donnait accès au château a subi de graves dommages au cours des siècles. Les belles portes romanes à impostes qui l'ornent
encore devaient constituer un ensemble architectural de grande qualité. Sa reconstruction fait partie des travaux projetés.
L'escalier à vis de quatre mètres de diamètre, bâti à l'intérieur du donjon initial, comporte soixante dix marches et donne accès à une terrasse, sommet de
la tour, qui domine le village et devait être couverte au Moyen Age.
Ce château acquis en 1779 par le marquis Louis Scipion de Nicolaï, baron de Sabran, propriétaire de l'autre château du village, fut vendu comme bien national, en deux parties en 1791. Restitué aux descendants des Nicolaï en 1826, il fut habité quelques temps par leurs héritiers jusqu'en 1886.Laissé à l'abandon pendant trente cinq ans, il fut utilisé comme "maison communale" accueillant par exemple la fanfare municipale ou les enfants du catéchisme. Pendant la première guerre mondiale, des ouvrières y conditionnaient des médicaments. Un perruquier a aussi exercé son art dans la salle des gardes !
Gabriel Arnaud, père de l'actuelle propriétaire, dont la famille vit à Cavillargues depuis le début du XVIIe, ne pouvant se résoudre à voir s'effriter cette magnifique demeure, en fit l'acquisition en 1919. Depuis cette date sa famille s'est employée à entrenir et restaurer cette splendide demeure
Les seigneurs de Cavillargues résidèrent en ce lieu depuis le XIIIe siècle.
Les Chaudeyrac, originaires de Lozère, furent Seigneurs de Cavillargues de 1250 à 1386 et occupèrent sporadiquement le château qui passa par héritage aux La Fare à la fin du XIVe et resta leur propriété jusqu'en 1779.
Les La Fare, originaires de Saint André de Valborgne qu'ils habitèrent à partir de 1170, Seigneurs de Cavillargues, constituaient une "maison considérable",
objet de plusieurs généalogies éditées.
Une dizaine de membres de la famille furent inhumés dans l'église paroissiale.
A noter que les La Fare ont également vécu au XVIe et XVIIe siècle au château de La La Bastide d'Engras.
Le nom seul de cet édifice indique que sa fondation est postérieure à la première croisade. Et de fait, un auteur généralement bien informé en attribue la construction à Guillaume de Sabran, seigneurs de Tresque, Sabran, Cavillargues, etc., qui fut le compagnon en terre Sainte de Raymond IV de Toulouse.
Par malheur, le retour de Guillaume de Sabran n'est rien moins que prouvé : ce personnage n'est plus connu après la prise de Jérusalem et son nom ne figure pas dans le testament du Comte de Toulouse, ce qui a fait supposer à l'historien de sa famille qu'il était mort avant cette date. Par conséquent le nom du fondateur de ce Saint-Sépulcre reste des plus hypothétiques. Il est à remarquer d'ailleurs que cette appellation n'est officielle que depuis peu de temps : jusqu'à la fin du 18e siècle, la chapelle fut connue sous le nom unique de Notre-Dame-des-Imbres, qui lui vint du quartier où elle est bâtie.
Au début du XVe siècle, elle appartenait, parait-il, au monastère de Saint-Juste-de-Sézade, au diocèse d'Aix.
Guillaume 1er qui fut Chambellan ordinaire du roi Charles VII en 1435, épousa en 1411 Almueys de Montclar (près de Génolhac), laquelle institua son 2e fils Guillaume son légataire universel à condition qu'il "écartèle" les armes des La Fare par les siennes.
Ainsi trouvons nous sur la clé de voûte de la salle des gardes, les "trois losanges d'or posés en pal" des Montclar.
Né dans ce château en 1613, s'illustra également comme officier du Roi.
De cornette (porte étendard) en 1636, il devint Lieutenant
général des armées du roi (Louix XIV) en 1651.
Entre temps il servit avec distinction au siège de Perpignan en 1642
et le Cardinal Mazarin le choisit pour commander la Compagnie de Gendarmes
et le régiment de cavalerie du Colonel de Ste Cécile son
frère.
Le roi le mit ensuite à la tête du régiment de Languedoc, lui donna le gouvernement de Balaguier, en Catalogne et celui du château de Hautpoul en Rousillon.Maréchal de camp en 1648, il fut récompensé de la prise de Tortosa (province de Tarragone) en obtenant le gouvernement de la ville de Rosès.
Mort de blessures à 42 ans en 1654 et enterré à Cavillargues>
Fils de Charles, il servit dans l'armée autrichienne contre les Turcs en 1664, puis devint Lieutenant de la Compagnie des gendarmes de Monseigneur le Dauphin.
Il est connu pour ses poésies qu'il dédia en grande partie à Madame de la Sablière.
En 1684, il est promu Capitaine des gardes du corps du Duc d'Orléans. Mais, à la suite d'une rivalité amoureuse avec Louvois, il tombe en disgrâce et se consacre à l'écriture.
Ses oeuvres poétiques sont jointes à celles de l'abbé de Chaulieu, dont il fut l'ami, dans l'édition de Saint Marc de 1755.
Il écrivit également des mémoires sur Louis XIV qui parurent en 1716.
Marquis de La Fare - Alais
Avec Fabre d'Olivet et Jasmin, il fut à l'origine de la renaissance de la langue d'OC qui aboutit au "Felibrige" de Joseph Roumanille et dont Mistral est la figure privilégiée.
Descendant d'un frère
de Charles François, poète languedocien auteur des Poésies
Raïoles Las Castagnados.
Il entreprit la rédaction d'un dictionnaire languedocien qu'il ne put achever.
Mort au château de Lacoste (près d'Alès).
Jacques II, Marquis de La Fare, Vicomte de Montclar (près de Genolhac), Seigneur de la Bastide d'Engras et de Cavillargues fut fait capitaine de cavalerie en 1638.
Il commanda l'escadron de la noblesse du Languedoc qui alla au secours de la place de Salses en Roussillon et obtint en 1646 l'érection de la baronnie de La Fare en titre de Marquisat.
Il épousa en 1613 Gabrielle d'Audibert fille de Charles Seigneur de Lussan, de Goudargues, de St Marcel et de Sabran dont il eut seize enfants. En 1634, le dix septième, mort né, coûta la vie à sa mère. Ils furent "enterrés à la chapelle que la maison a dans l'esglise dudit Cavilhargues à main droitte en entrant dans ladite esglise"
Jacques 1er (1530 - 1600) présida à la reconstruction du château. Les "pris faicts" portent sa signature.
Il fut gentilhomme ordinaire de la chambre du roi Henri IV, servit à la défense de Sienne contre Charles Quint, en 1555, sous le commandement de Blaise de Montluc,commanda dans les villes d'Alais et de Roquemaure et rendit hommage à Hercule de Montmorency comme procureur de Henry de Montmorency, Pair et Maréchal de France.
Baron de Montclar, de Salendrenques, Seigneur de Montjoye, Sainte Foy, Blanaves, Servières, Engras et Cavillargues,
Il épousa à Cavillargues en 1576 Hélix du Puech (St Martin, près d'Alès) , une des dernières descendantes des Bellecombe de Gaujac qui avaient été co-seigneurs de <Cavillargues au XVe siècle.
Louis, Seigneur de La Tour, épouse en 1629 Elisabeth de Gase fille d'Angeli Seigneur de Saint Marcel d'Ardèche. Le père d'Elisabeth, Joseph Louis Dominique, obtint les lettres élevant en Marquisat les terres de Vénéjan en 1751.
Succédant à son père en la charge de Capitaine des gardes du corps du Duc d'Orléans, il fut nommé Maréchal de Camp en 1720 et tint les Etats du Languedoc à Narbonne en 1724.
Chevalier de la Toison d'or et de l'ordre militaire de Saint Louis, Chevalier des Ordres du roi en 1731, Lieutenant général des armées en 1734, Chevalier d'honneur de Madame la Dauphine en 1745, il fut nommé Maréchal de France en 1746.
Il épousa Françoise Paparel, fille de Claude François Seigneur de Vitry sur Seine, trésorier de l'extraordinaire des guerres et qui acheta la façade du n°14 de la Place Vendôme, construite sous l'impulsion de Louvois, afin d'édifier, à l'arrière, l'hôtel particulier dont Philippe Charles fut ultérieurement propriétaire et qui porte encore le nom d'Hôtel de La Fare.
Gouverneur de Gravelines en 1751, il mourut à Paris le 4 septembre 1752
Il servit les rois de France de 1539 à 1563 contre les religionnaires".
Ceux ci brulèrent ses châteaux dont celui de Cavillargues, en 1562. Il est enterré à Cavillargues.
Brillant officier de Sa Majesté, il fut tué en 1513 à la journée des Eperons pendant le siège de Terouanne (Pas de Calais).
Il portait les titres de "Seigneur et baron de Montclar et des châteaux et mandemens de La Fare, de la Tour, de Fontenilles, Montjoye et de la Vessière, Co seigneur de la Baronnie de Monteil et des lieux, châteaux et Mandemens de Cavillargues Servières, Pierremale et autres lieux dans les diocèses de Nîmes, Uzès et Mende"
Il fut enterré à Cavillargues
Entré très tôt dans les Ordres, il devint vicaire général de Dijon à 23 ans.
Nommé élu général du Clergé des états de Bourgogne en 1784, sacré évêque de Nancy en 1788, Louis XVI le choisit pour prononcer le sermon de la messe d'ouverture des états généraux le 4 Mai 1789, sermon qui eut un retentissement considérable.
Passionné par les libertés, il se manifeste cependant à l'Assemblée Constituante par ses prises de position en faveur de l'Eglise en s'efforçant d'élaborer un compromis avec la Révolution jusqu'à la rupture due à la Constitution civile du clergé.
Il quitte Paris, se retire en Autriche où pendant plus de vingt ans il fut chargé de la correspondance des princes de la famille royale de France.
Rentré en France en 1814, il devint aumônier de la duchesse d'Angoulème.
Louis XVIII l'adjoignit à Talleyrand pour administrer les affaires ecclésiastiques. Evêque de Sens puis Cardinal en 1823, il prononce à Reims en 1825 le discours religieux précédant le sacre de Charles X.
Il meurt aux Tuileries en 1829. Il laisse de curieux Mémoires sur son émigration.
Ce puits, probablement du XIVème et bouché lors de la reconstruction du château au XVIème, a été découvert lors du décaissage de la cours entrepris pour restaurer son niveau originel.
Nous espérions trouver quelques ustensiles ou tessons lâchés
par inadvertance il y a quelques siècles.
Nous sommes descendu à l'intérieur, avons pu admirer le mur construit en pierre "sèches", de section circulaire et reposant sur 4 madriers horizontaux placés en carré comme cela est le cas général des puits construits à cette époque.
Malheureusement pas l'ombre d'un tesson. Nous supposons qu'il a été
nettoyé avant d'être bouché.
Une maçonnerie telle qu'elle devait exister à l'origine surplombe
maintenant le puits. Elle intègre un fragment de margelle retrouvée sur les lieux.
Une pompe à main a dû être reliée à ce puits après sa fermeture car une canalisation en brique a été retrouvée.
Les chapiteaux se conforment aux trois ordres grecs.
Construite à la fin
de la renaissance, elle date de 1570. Pour mémoire, les châteaux
de la Loire datent de 1510 à 1540.
En haut de la photo de gauche, on aperçoit la
tour médiévale qui domine
le château et dont la base est visible dans la
salle des gardes . On distingue également
les gargouilles qui déversent leurs torrents
d'eau dans la cours durant les orages estivaux.
Sur la façade elle-même, on remarque les trois ordres Grecs
: dorique, ionique et
corinthien. Les chapiteaux sont caractéristiques
de ces ordres.
En Grèce ces trois ordres se sont succédés dans le temps
mais dans l'architecture néo-grecque de la renaissance ils sont
utilisés simultanément. La succession des étages figure
le passage du temps.
Percée dans les murs d'un château, la canonnière est une ouverture permettant de tirer au canon ou au mousquet sur les assaillants.
Construites dans le rempart du XIVème siècle, deux canonnières existent toujours actuellement.